Matt enfila son boxer avant de laisser tomber sa serviette, il se souciait très peu de ce que Casper pouvait penser ou voir de lui, qu'est-ce-que ça changerait ? Cependant il jetait des regards en coin de temps en temps et remarqua qu'à chaque fois il le regardait, c'était troublant en plus d'être perturbant, et pour perturber l'agent Lawrence faut y aller. Encore une fille d'accord ! Mais un mec ... Bon c'était pas comme si Casper n'était pas mal foutu car de ce qu'il avait pu en voir il était plutôt beau gosse et bien monté, mais dans la position où il était il lui faisait plutôt dos. Matt attrapa son jean et l'enfila, tout en bouclant sa ceinture il prit la parole « En principe t'as pas besoin d'un quart d'heure pour réfléchir. Tu as ... Comment on dit déjà ? Ah oui, la science infuse. » L'agent fit un signe de la main pour imiter une subite illumination, pour taquiner son partenaire évidemment mais aussi pour rompre le silence qui s'était installé entre eux. Intimement il doutait que Casper soit gay ou même bi, il avait une façon de traiter les autres agents et une façon de prêter attention à la petite secrétaire qui laissait présager tout le contraire. Autant dire que ce n'était pas vraiment le sujet à aborder. Ensuite l'agent mit la main sur sa chemise blanche et l'enfila, prenant le temps de bien attacher chaque bouton pour que son supérieur n'ait aucun reproche à lui faire, cependant il n'attacha pas les deux derniers du haut. En relevant la tête il croisa le regard de Casper et sur le coup il faillit lui sourire, à croire que cette petite escapade l'avait ramolli ou bien attendrit, ou bien que le charme fou du criminologue commençait à avoir un certain impact sur lui. Finalement il détourna la tête et attrapa sa veste noire d'uniforme qu'il enfila rapidement sans attacher, puis la cravate. Ah le fameux nœud de cravate ... Il s'y prenait toujours à dix fois avant de le réussir et ça le gonflait rapidement mais il était obligé de porter l'uniforme si il ne voulait pas avoir le patron sur le dos. Finalement il laissa la cravate pendre de chaque côté de son coup le temps d'attacher à sa ceinture sa plaque d'agent et son arme, il reprendrait le nœud de cravate plus tard.

« Justement, imagine comment il peut être pénible d’organiser toutes les informations contenues dans mon cerveau. » Ce n’est pas vraiment une blague, même si mon ton est amusé. C’est vrai que, parfois, j’ai du mal à garder la tête sur les épaules, avec toutes les données qui transitent dans celle-ci. Je ne suis pas tout à fait normal, je le sais. Ce n’est pas tout le monde qui pourrait faire ce que je fais. Se mettre à la place des tueurs. Leurs valeurs morales les empêchent de penser à certaines choses, trop inhumaines, trop peu naturelles pour effleurer leur esprit. Je n’ai pas ce problème. Les faits défilent dans mon esprit simplement et je comprends l’ensemble qu’ils forment. Comme j’arrive plutôt facilement à comprendre les actions des gens autour de moi. Cependant, à la manière de certains sociopathes, si je n’ai pas de mal à comprendre les autres, dès que je suis impliqué de top près, mes capteurs flanchent. Je suis pris au dépourvu. Lawrence me déstabilise, il me rend nerveux et, ironiquement, c’est ce qui m’empêche de le lire comme je le fais avec tous les autres, alors que c’est lui que j’aimerais le plus comprendre. Je veux le cerner pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Enfin, je crois. Il est vrai qu’une petite partie de moi s’excite à l’idée d’être dans le noir. Je ne peux pas faire de prédictions, face à lui et, quelque part, ça rend nos échanges plus vrais, palpables, aussi immatures et blessants soient-ils. Je n’arrive jamais à deviner ses intentions vis-à-vis de quoi que ce soit ou qui que ce soit. C’est frustrant mais, quelque part, tellement agréable, de me retrouver comme n’importe quel être humain. J’enfile mes vêtements rapidement, soulagé que Lawrence ne regarde pas dans ma direction. C’est une question de secondes et je suis tout habillé. Évidemment, je ne porte pas l’uniforme. Lorsque je me retourne, Matt est en train d’attacher chacun des boutons de sa chemise avec un soin que je ne lui connais pas. Il lève les yeux sur moi et, pendant une fraction de seconde, je crois apercevoir l’ombre d’un sourire sur ses lèvres. Je souris aussi, mais c’est pour me moquer de son incapacité à faire un nœud de cravate. Elle pend de chaque côté de son cou, et je blâme les propriétés hypnotiques de cette image pour mes actions suivantes. Sans penser, je m’approche de lui et, saisissant les deux extrémités de la cravate, fais le nœud. Il ne me faut que quelques secondes pour arriver à mes fins. Je suis passé pro dans cet art à force de devoir m’habiller chic lors des récitals d’Ophelia. Ce laps de temps est cependant suffisant pour que je remarque la différence de taille entre moi et mon co-équipier, son odeur et la largeur de ses épaules. Heureusement, je reprends vite mon sang-froid, reculant – peut-être un peu trop rapidement – de plusieurs pas une fois ma mission accomplie, le souvenir de mon dos pressé contre le mur peut-être un peu trop frais encore dans mon esprit. Je suis trop loin de lui pour qu’il entende les battements rapides de mon cœur. Je lève les yeux vers lui, non sans avoir pris la peine d’afficher mon sourire le plus suffisant. « Tu devrais peut-être acheter celles qui s’agrippent au col, tu sais, comme pour les enfants. Un matin sur deux ton nœud est à l’envers. »

Matt roula des yeux en entendant sa remarque, ce type se prenait vraiment pour un crack « C'est ça Einstein. » N'empêche qu'il galérait avec son foutu nœud de cravate, il avait toujours du mal et passait bien dix minutes chaque matin pour en faire un approximativement potable. Autant dire qu'avec son impatiente légendaire, la crise de nerf était pas loin et là, avec la journée qu'il avait eu ça n'allait pas tarder à venir. Il était sur le point d'abandonner quand Casper s'approcha de lui et prit les choses en mains, en fait ce geste le surprit tout d'abord et il manqua de le repousser avant de se rendre compte qu'il n'y avait sûrement pas d'arrière pensée à ça. Enfin lui il en avait, l'odeur de son partenaire ne l'aidait pas franchement à se concentrer et sa proximité encore moi, tout ça devenait de plus en plus dérangeant. Les battements de son cœur s'étaient accélérés et si il s'écoutait il l'aurait déjà embrassé mais il se rabâchait mentalement qu'il n'y avait aucune chance que Casper soit homosexuel, déjà parce que à ses yeux c'était un gros macho et ensuite parce que c'était pas écrit sur son front. Quoique pour sa part ce n'était pas non plus le cas alors ... L'espoir fait vivre hein ? Matt en avait sûrement trop et lorsque le criminologue s'écarta après avoir prit seulement quelques secondes pour faire le nœud, il pu souffler discrètement, satisfait de n'avoir cédé à aucune pulsion. Et paf une autre remarque ! Ce genre de choses exaspérait particulièrement Matt et il ne se gênait pas pour lui répondre « Tu sais, à l'envers ou à l'endroit ça m'empêchera pas de te pendre avec. » Le jeune agent lui afficha son sourire le plus faux en le regardant droit dans les yeux avant d'enfiler sa veste sombre. Parfois il se demandait si leurs échanges verbaux n'étaient pas le signe qu'ils s'attiraient mutuellement, mais au final il se disait que c'était beaucoup trop tordu pour être réel. Quoique ... Non valait mieux qu'il chasse toutes les pensées concernant Casper de sa tête sinon il serait incapable de réfléchir correctement. Puis l'agent prit le chemin des escaliers, tous les deux n'étaient pas arrivés à la moitié des marches que Matt fit volte face, sur le point de dire quelque chose mais se ravisa rapidement, se détourna et reprit sa route. C'était une très mauvaise idée d'aborder un sujet aussi délicat maintenant. Surtout que Matt et la délicatesse sont divorcés depuis des lustres.

« M’appeler Einstein, ce n’est pas tellement extra, comme insulte. Je vais le prendre comme un compliment. » Je lui adresse, à mon tour, mon sourire le plus faux. Lorsqu’il me fait le commentaire sur la pendaison, je n’ajoute rien. Je me contente de détourner le regard, gêné d’avoir laissé mes impulsions gagner et peut-être un peu blessé, aussi. Enfilant mes derniers vêtements, je le suis en dehors du vestiaire. Je prendre le temps de répondre au message texte que ma sœur vient de m’envoyer. Je range mon fidèle compagnon dans ma poche avant de le suivre dans les escaliers. Soudainement, il arrête de monter et se retourne vers moi. Lawrence fait quelques centimètres de plus que moi mais, ainsi, dans les escaliers, je me sens vraiment diminué. Je le suivais de près et j’ai – encore, décidément, ça va devenir une habitude – failli lui rentrer dedans. Il ouvre la bouche pour parler. Moi, je ne bouge pas d’un centimètre. Je n’arrive pas à détacher mes yeux sont de visage, et ce, même si je dois lever la tête pour le regarder dans les yeux, ce qui me fait sentir encore plus ridicule. Une fois encore, je n’arrive pas à le déchiffrer. Je vois clairement qu’il hésite. Je voudrais l’encourager à parler, je ne sais pas pourquoi. Je n’arrive cependant pas à ouvrir la bouche pour en faire sortir les mots qui me viennent à l’esprit. J’ai probablement même arrêté de respirer. Finalement, au bout de quelques secondes qui m’ont parues interminables, il se retourne et ne dit rien. Il est déjà arrivé tout en haut de l’escalier lorsque je sors enfin de ma torpeur, montant deux marches à la fois pour le rattraper. J’ai envie de l’interroger sur ce qu’il voulait dire mais j’ai comme l’impression qu’il ne s’en refermera que davantage. Du coup, un peu par lâcheté, je choisis la solution facile, laissant échapper le premier commentaire suffisant qui me vient à l’esprit. « Je t’enlève les mots de la bouche ? Je sais que je suis séduisant, mais je ne croyais pas que je te faisais autant d’effet, Lawrence. » Je pose une main sur son épaule, disant cela. À la seconde où les mots sont prononcés, je les regrette. J’aurais peut-être dû tenir ma langue, pour une fois. Je n’ai pas spécialement envie que mon co-équipier me frappe ou quoi que ce soit. Comme pour confirmer mes pensées, la contusion dans le haut de mon dos m’élance. Pourtant, j’affiche encore le sourire que je réserve habituellement aux jolies demoiselles avec lesquelles je flirte malgré mon orientation sexuelle, avec peut-être une touche de moquerie qu’on n’y retrouve pas habituellement. Je n’arrive pas à me l’enlever du visage.

Si Casper l'avait mieux connu il aurait sans doute vu que quelque chose le tracassait depuis leur altercation dans la maison où avait lieu l'enquête. Le problème c'est que même lui-même ne savait pas quoi, dans sa tête c'était le bordel. Son partenaire avait un comportement tellement spécial avec lui qu'il pourrait lui demander clairement si il était gay ou non pour agir ainsi mais sa crainte de se faire démasquer était trop grande. L'image du séduisant agent Lawrence tomberait en miette à la seconde où cette question sortirait de sa bouche. Il était arrivé en haut des escaliers le premier et avait pu ainsi se reprendre un peu avant de se faire rattraper par Faust. A peine était-il arrivé à ses côtés que déjà il reprenait les rênes de la partie, comme si ils n'avaient pas tous les deux joués aux plus cons aujourd'hui. Il sentit la main de son partenaire se poser sur son épaule et son cœur fit un bond dans sa poitrine, les contacts amicaux entre eux étaient plus que rares voir inexistants et si le silence avait régné en maitre à cet instant Casper aurait entendu son cœur bondir alors qu'il l'avait simplement touché. Le regard qu'il lui lança ensuite n'avait rien d’agressif ou de méprisant, il semblait juste perdu dans ses pensées, il avait de plus en plus de mal à dire qui il était réellement et se le dire tous les matins devant la glace ne suffisait plus à s'en convaincre. A cet instant précis, peut-être qu'une lueur de tendresse illuminait les yeux du jeune agent. Il entendit des pas à l'autre bout du couloir et aperçut un officier qui arrivait dans leur direction, reportant son attention sur Casper il dégagea son épaule d'un brusque mouvement sans lui accorder un regard de plus, il savait déjà qu'il s'était trahit, comme un con « Si t'en es si sûr postule pour être miss America, tu ferais un tabac. » Il ne pouvait pas ne pas le chambrer à cet instant alors qu'un de leur collègue les croisaient, il aurait trouvé ça louche. Matt se dirigea vers son bureau, enfin leur bureau et une fois à l'intérieur il repoussa son bureau pour qu'il reprenne sa place initiale, attrapa son fauteuil d'une main et s'y assit en soufflant.

Lorsqu’il se tourne vers moi, pourtant, ce n’est pas la colère ou le dégoût auxquels je m’attendais qui me font face. L’expression que je trouve sur le visage de mon co-équipier m’est difficile à saisir. Il n’y a rien d’agressif dans ses traits. Ses yeux me paraissent plus grands qu’à leur habitude, et son habituel sourire moqueur est absent, laissant des lèvres qui se tiennent sur une ligne droite, une bouche peut-être un peu hésitante. Il me paraît confus, peut-être même un peu triste ou désespéré, mais je n’ai jamais été très doué pour lire Matt. Pendant une infime fraction de seconde, je me dis que c’est quelque chose de plus positif que je lis dans son regard. Une forme d’affection, peut-être. Malheureusement, le moment est interrompu, brisé par l’arrivée impromptue de l’un de nos collègues. Il passe près de nous et Matt se dégage brusquement, presque violemment, non sans me lancer une des piques dont lui seul a le secret. Je ne réplique rien cependant, je suis trop perdu, trop occupé à tenter de résoudre l’équation, trop secoué par une réaction à laquelle je ne m’attendais pas. Je ne suis pas plus avancé lorsque nous atteignons notre bureau. Je me penche, cueillant une à une les feuilles de papiers, photographies et autres choses laissées par ma personne sur le sol : tout pour ne pas avoir à le regarder dans les yeux. Il est assis dans son fauteuil et j’ai l’impression de pouvoir sentir ses yeux sur moi. Ce qui est ridicule. Je ne peux pas savoir s’il me regarde, encore moins le sentir, et j’ai toujours trouvé cela un peu bizarre lorsque, dans un film ou dans un livre, le personnage s’aperçoit de la présence d’une autre personne pour cette raison. Enfin, maintenant que je ressens la sensation, je comprends un peu mieux de quoi il est question. Je reste donc penché, jusqu’à ce qu’il ne reste plus que quelques feuilles éparses sur le sol. Cela ne peut cependant pas m’occuper éternellement et, après un moment, je réalise que tous les documents sont dans mes mains. Je me redresse doucement et passe une main fatiguée dans mes cheveux – la gauche, pour ne pas trahir mon bleu en bougeant mon épaule meurtrie –, toujours sans le regarder. Le silence est de plus en plus lourd, presque étouffant, et je finis par parler simplement pour le briser, sans vraiment penser à ce que je vais dire. « Tu n'aurais pas dû descendre, tu aurais pu te faire tuer. Je n’ai pas spécialement envie d’avoir un co-équipier mort sur le dos. Eric refuserait de m'assigner quelqu'un d'autre. » C’est sorti peut-être un peu plus durement que je l’aurais voulu, et j’entends déjà les protestations de Lawrence, mais je le pense. On ne risque pas sa vie, comme ça, en prenant des risques inutiles. On aurait dû appeler du renfort. Et alors, ça me frappe : je n'ai pas eu spécialement peur pour ma propre vie, mais j'avais vraiment peur que Lawrence se fasse tuer. J'étais presque hystérique à l'idée qu'il ne soit qu'à quelques centimètres du tueur. La réalisation ne fait qu'augmenter ma colère. C'est comme si j'étais en état de choc et que la tension venait de retomber, révélant mes véritables sentiments. Primairement, la fureur. Sans lui laisser le temps de me couper la parole, je me remets à parler, un peu plus fort, me tournant vers lui. « Je sais que tu ne voulais pas travailler avec moi et je sais que c'est probablement une plaie pour toi, mais ce n'est pas une raison pour te lancer seul à la poursuite d'un tueur qui découpe ses victimes en morceaux. Si tu aimes tellement risquer ta vie, demande à Eric une réaffectation. On risque sa vie à plusieurs quand on est dans une équipe d'intervention, pas quand on visite casuellement une scène de crime. »

Matt demeurait assit dans son fauteuil sans bouger, il suivait Casper du regard tandis que celui-ci ramassait les feuilles de papiers qu'il avait éparpillé dans la pièce quelques heures plus tôt. Son regard se perdit rapidement dans le vague, il songeait à ce qu'il avait ressentit au court de cette journée et à ce qui aurait pu se passer si telle ou telle chose était ou n'était pas arrivée. Ses nerfs commençaient à lâcher et il le sentait bien mais il devait rester maître de lui sans quoi ce foutu criminologue qui lui mettait la tête à l'envers allait le chambrer jusqu'à la fin de ses jours. Ses pensées furent interrompues par les paroles brutales de son partenaire, Matt accompagna cette soudaine montée de colère d'un haussement de sourcil intrigué mais il n'eut pas le temps d'en placer une avant qu'il n'est finit son discours. Casper n'avait pas totalement tort, c'était plutôt à lui qu'il fallait assigner un baby-sitter et non pas à Faust. Mais les choses sont ce qu'elles sont et l'agent ici, c'était lui « Peut-être parce que je suis le seul tordu du bâtiment qui ait assez à perdre pour être obligé d'accepter de de chaperonner. » Matt avait été mordant et sec, il n'avait pas voulu ce binôme et il vivait très bien avant que ce type ne se pointe ici, depuis qu'il était là c'était un bordel constant, un embouteillage sans fin dans son cerveau et tout ça lui pesait sur les nerfs. Lawrence passa la main dans ses cheveux sans faire attention à les décoiffer ou non, il s'en fichait royalement puis il laissa retomber sa main sur le bureau « Et tu vas faire quoi ? Me donner des lignes à copier ? » Matt secoua la tête, il savait que son partenaire avait raison mais il avait toujours prit des risques, parfois mêmes insensés et qui avait faillit lui coûter la vie il n'y a pas si longtemps, visiblement ça ne lui avait pas servit de leçon « Et puis tu crois que t'es la source de mes problèmes ? Mais ... Attend, en fait si t'es une vraie source à problèmes et t'es la source de mes emmerdes, quand t'es dans les parages j'arrive pas à réfléchir correctement, tu bouffes mon espace vital et je suis mal à l'aise dès que tu poses les yeux sur moi. Merde, c'est quoi ton problème !? » Matt s'était levé brusquement pendant qu'il parlait et en était presque à crier sur Casper tellement ses nerfs étaient à fleur de peau, ses mains étaient posés sur le bureau. Il n'avait pas vraiment réfléchit à ce qu'il disait, c'était sortit comme ça et maintenant il se demander ce qui allait en résulter.

J’encaisse sa première réplique comme un coup au ventre. J’avais déjà deviné que le patron avait dû l’obliger, d’une façon ou d’une autre, à travailler avec moi, mais l’entendre de sa bouche ce n’est pas la même chose. Avant, il y avait toujours une petite chance que je me trompe. Maintenant je sais que j’avais raison et, malgré moi, ça me fait mal. Je l’écoute sans broncher, ma colère alimentée par la frustration et la douleur que provoquent ses mots en moi. Lorsqu’il se lève, je réprime un mouvement de recul. Ce simple fait semble me donner un regain d’énergie. J’avance vers lui jusqu’à ce que rien ne nous sépare sauf son bureau. Je ne crie pas, au contraire, je chuchote presque, mais ma voix est grave et trop calme pour être naturelle. « Et toi, tu vas faire quoi ? Renverser le bureau ? Me jeter contre le mur ? Erik aurait au moins pu m’assigner un agent qui ait une façon de communiquer autre que de violenter les gens. » C’est bas et j’en ai conscience. Après tout, il s’est excusé, à sa façon, et je me doute bien que c’était probablement une première pour Lawrence. Je ne l’imagine pas faire preuve de violence envers ses autres co-équipiers. Et pourtant, j’ai envie de le blesser, moi aussi. Ou peut-être simplement de le mettre en colère. J’ai envie de lui faire perdre le contrôle. Après tout, il me fait perdre le mien quotidiennement. Je serre les dents et les poings. Je n’arrive pas à détacher mes yeux de lui. Comme ça je suis son problème ? Je le déconcentre, je fais de son travail un enfer ? Avant qu’il arrive ici, j’étais la princesse du FBI. Je contrôlais tout, j’avais tout ce que je voulais. Je laisse échapper un rire sans joie qui, selon moi, a quelque chose d’un peu effrayant. « J’ai demandé à Erik de me débarrasser de toi après ton deuxième jour ici. Normalement, il exauce les moindres de mes désirs. Merde, c’est parce que j’ai voulu aller et venir comme ça me chante que j’ai dû avoir un agent sur le dos. À la base, tu es un caprice. Il ne veut m’assigner personne d’autre. C’est la seule et unique raison pour laquelle tu es encore ici. Si je veux pouvoir oublier la procédure, j’ai besoin d’un chaperon, ordre de la défense. Si je pouvais choisir, je serais jumelé à autre chose qu’un homophobe immature avec de sérieux problèmes d’impulsivité. » Mes derniers mots respirent la rancune. J’ai alors conscience qu’en parlant je me suis penché vers lui jusqu’à ce que seulement quelques centimètres nous séparent. C’est comme si sa simple présence arrivait à faire oublier à mon corps le concept d’espace personnel. Je ne recule pas, jugeant que ce serait une preuve de faiblesse, me contentant de le dévisager.

Matt est debout derrière son bureau mais sa colère semble être retombée et les mots de Casper, loin de la ferme remontée, l'atténue et le blesse profondément. Si il avait su tout ça plutôt il serait déjà partit. En fait il n'était qu'un pion dans tout ça ? C'était ainsi qu'il le ressentait mais ce n'était pas ce qui lui faisait le plus mal. Malgré le fait que Faust l'exaspère continuellement il était, dans tout le service, le seul à qui il aurait pu envisager lui confier quelque chose d'important, d'intime. Mais les mots qui raisonnaient dans sa tête venaient de l'en dissuader à tout jamais, il n'avait pas envie d'être le jouet avec le quel on s'amuse pour se distraire ou pour permette à quelqu'un d'autre de s'amuser. Rien que pour ça il pourrait donner sa démission, parce qu'il étai profondément vexé mais avec le peu de fierté qui lui restait il resterait. Rien que pour pouvoir, jusqu'au bout, faire vivre un enfer à certaines personnes. Matt n'avait rien à répondre à tout ce que son partenaire venait de lui jeter à la figure, il avait trop de mal à encaisser et à digérer les derniers mots qu'il avait prononcé. Lui un homophobe ? Si il savait ... Si seulement il savait. Ce n'es qu'après s'être dit cela qu'il percuta, peut-être sans le vouloir, Casper venait de lui annoncer qu'il était gay ? Une nouvelle fracassante qui éveilla l'esprit du jeune agent et le fit sortir de la lassitude dans laquelle il avait sombré. ce n'est qu'à cet instant qu'il se rendit compte de la proximité que Faust avait instauré entre eux. L'avait-il voulu ? Ou était-ce juste dû au feu de l'action ? Dans les deux cas il ne semblait pas vouloir faire un pas en arrière. Le cœur de Matt tambourinait dans sa poitrine et l'ange et le démon sur ses épaules s'adonnaient à un duel concernant la suite des évènements, son cerveau avait arrêté de fonctionner, du moins la partie raisonnable et la partie du désir s'était éveillée mais était-ce bien le moment ? Après qu'ils se soient fait mal mutuellement était-ce vraiment le moment de faire tomber les masques ? Sans réfléchir Matt plongea sur les lèvres de son partenaire, lui donnant un baiser plein d'ardeur et ce baiser qui devait être furtif dura quelques seconde de plus, secondes où la tendresse s'installa avant de s'en aller lorsque Matt mit fin à ce baiser que peut-être Caser ne désirait pas.

Je le regarde et je lis. Je sais que j’ai réussi à l’atteindre, ça se lit sur son visage. Malheureusement, la satisfaction que j’attendais, elle, ne vient pas. Je devrais sauter de joie. C’est ce que je voulais, ce que je veux depuis le début de notre échange… le faire souffrir. Lui cracher quelque chose au visage qui l’atteigne, ne serait-ce que pour faire tomber pour de bon son sourire arrogant. Une forme de vengeance. Et pourtant, tout ce que je ressens, à ce moment précis, ce sont des remords. Je ne pensais pas vraiment ce que j’ai dit. Comme je l’ai déjà avoué à ma petite sœur, j’ai apprécié l’intelligence de mon co-équipier, sa perspicacité dès le début. J’ai toujours pensé qu’il aurait été plus facile à détester s’il avait été stupide. On ne tombe pas amoureux des gens stupides. Je n’arrive plus à décrocher mes yeux de son visage, où tout un tas d’émotions se succèdent. Je n’arrive pas à convaincre mon corps que la chose à faire c’est reculer. Puis, avant même que j’aie eu le temps de réaliser ce qui se passe vraiment, ses lèvres sont sur les miennes. Je laisse échapper un grognement de surprise. Dire que je suis surpris, ce serait le plus grand des euphémismes. J’ai à peine le temps de fermer les yeux. À cause de notre position précaire – un bureau nous sépare –, il m’est physiquement impossible de m’accrocher à lui de quelque façon que ce soit. Lorsqu’il se détache, reprenant peut-être ses esprits, je ne peux pas m’empêcher de pousser un nouveau grognement, de frustration, cette fois. Je jette un regard bref au meuble en bois, entre nous. Sans me laisser le temps de penser davantage – je pourrais changer d’avis –, je contourne celui-ci à demi. Lorsque je suis assez près de lui, je tire sur la veste de mon co-équipier, lui faisant faire quelques pas de côté, puis joignant nos lèvres à nouveau. Je sais que c’est une mauvaise idée. Qu’il doit y avoir une attrape quelque part. Si ça se trouve, c’est une nouvelle façon qu’il a trouvé de se foutre de moi, mais je ne peux pas m’en empêcher. Je me contente d’abord de coller ma bouche à la sienne, savourant la douceur de la sienne – Lawrence a de vraies lèvres de fille. Je glisse une main dans ses cheveux, chose que je me suis imaginé faire une bonne centaine de fois, sans cesser de l’embrasser.

Leurs lèves s'étaient séparées et il ne saurait dire ce que le grognement qu'avait émit Casper signifiait, il n'avait pas envie de jouer aux devinettes et surtout pas maintenant alors que son cerveau tournait plus vite qu'un moteur en surchauffe. Tout se bousculait dans sa tête, pourquoi il avait fait ça ? Comment il en était venu là ? Casper l'avait poussé à bout en lui jetant toutes ces horreurs à la tête et il aurait du lui coller une droite mais au lieu de ça il l'avait embrassé, c'était sûrement la chose la plus insensée qu'il ait fait de toute sa vie. Il vit son partenaire faire le tour du bureau qui les séparaient et son cœur accéléra sa cadence comme si ce n'était pas déjà bien assez, allait-il s'en prendre une ? Il l'aurait mérité en tout cas mais au lieu de ça Faust l'attrapa par un pan de sa veste et l'attirant vers lui, mouvement auquel Matt ne résista pas malgré ce qu sa tête lui disait. Ce fut lui qui joignit leurs lèvres pour un nouveau baiser et ce contact le surpris lui qui s'attendait à bien pire. Tout d'abord il ne bougea pas, ne sachant trop quoi faire tandis que Casper glissait sa main dans ses cheveux. Il ne put que mettre un peu plus d'intensité dans le baiser qu'ils échangeaient, chose qu'il se surprit à faire à croire que son inconscient le voulait depuis longtemps. Ce n'était pas comme embrasser une fille, Matt ne savait pas quoi faire de ses deux mains, c'était très différent et ça le déstabilisait. Si jamais quelqu'un les surprenaient c'en était finit de leur réputation, tout le service serait au courant et ça deviendrait un véritable enfer mais Faust ne semblait pas se soucier de ça. Finalement le jeune agent choisit de ne pas se préoccuper de tout ça maintenant mais de savourer le baiser qu'ils étaient en train d'échanger. Et dire qu'il l'avait traité d'homophobe il y a peu, il devait regretter de l'avoir traité de cette manière mais ça ne changeait rien à tout ce qu'il avait dit d'autre, ça lui avait fait vraiment mal et même si ça se voyait sur son visage ou dans ses yeux il ne l'avouerait jamais, comme il n'avouerait jamais qu'il aime Casper. Finalement Matt glissa sa main sur la nuque de son partenaire, si dès leur première rencontre il avait su que les choses finiraient comme ça il aurait sans doute agit différemment mais ce qu'il redoutait c'était le regard des autres si jamais le comportement de l'un vis à vis de l'autre changeait.

Je peux presque entendre l’ensemble des muscles de mon corps pousser un soupir de soulagement, de plaisir et d’adoration lorsqu’il répond à mon baiser. Sa main sur ma nuque, ses lèvres contre les miennes, j’ai presque l’impression que moi et Matt allons nous fondre l’un dans l’autre. Ses lèvres sont un peu féminines, infiniment douces, davantage que toutes celles que j’ai goûtées jusqu’ici, et j’en veux toujours plus. Rien au monde ne pourrait m’obliger à mettre fin à notre baiser. À l’exacte seconde où cette pensée effleure mon esprit brumeux, je me rappelle que je suis un être humain et que tout mammifère qui se respecte doit, d’une manière ou d’une autre, respirer. C’est donc avec une certaine réticence que je sépare nos deux bouches, sans toutefois avoir le courage de me séparer complètement de lui. Dès la première inspiration, j’ai envie de l’embrasser à nouveau, mais quelque chose me retient et je ne bouge pas. Nous sommes près, trop près, et j’ai l’impression que, quoi que je fasse, je n’arriverai jamais à me débarrasser de son odeur. Ma respiration est saccadée, mon cœur bat trop rapidement pour que je puisse le suivre et je n’arrive plus à aligner mes pensées. C’est comme si, en laissant mes désirs l’emporter sur ma raison, j’avais complètement fermé mon cerveau à toute forme de réflexion cohérente. J’appuie mon front contre celui de mon co-équipier sans arriver à me détacher de lui, une main caressant paresseusement sa nuque, l’autre qui n’a toujours pas lâché son emprise sur sa veste. Ce n’est pas sage. Après tout, nous venons à peine de nous crier dessus. Il a avoué travailler avec moi par obligation, je l’ai traité d’homophobe. Je ne sais pas combien de temps nous restons dans cette position, silencieux, avant que je reprenne suffisamment mes esprits pour ouvrir la bouche et demander le premier : « Qu’est-ce qui vient de se passer ? ». C’est une question stupide et je sais très bien ce qui vient de se produire. Nous nous sommes mutuellement sauté dessus, et il semblerait que la tension que je ressentais entre nous n’était pas que de la haine. Pour une raison ou une autre, Matt Lawrence a envie de moi. Malgré moi, la constatation me fait sourire et je sais que ma joie risque fortement d’être interprétée comme de la moquerie ou de la suffisance, mais je ne peux pas la réprimer. Matt Lawrence est homosexuel et il vient de m’embrasser dans notre bureau au FBI. Il y a de quoi se réjouir.

Leurs lèvres venaient de se séparer et Matt pouvait désormais reprendre sa respiration mais il n'osait pas regarder son partenaire dans les yeux, il ne voulait simplement pas voir ce qui passait dans ces yeux à cet instant. La main de Casper était sur sa nuque et la caressait doucement ce qui faisait courir des frissons le long de l'échine du jeune agent. Bientôt il se rendit compte que la proximité qui les avaient rapprochées quelques minutes plus tôt n'avait pas été rompu et cela commençait à le déranger mais il ignorait si il devait reculer ou l'embrasser à nouveau. Finalement il recula brusquement, rompant la distance qui les rapprochaient pour en instaurer une plus importante encore. Matt se rembrunis face à la question de Faust, il jouait à quoi là ? C'était stupide comme question et il ne prit pas la peine d'y répondre. Peut-être qu'il n'assumait pas ce qui venait de se passer, ce qu'il était désormais. Il était con, c'était certain. Son cerveau tournait à cent à l'heure, essayant de trouver un prétexte à ce qui venait de se passer. Il pourrait facilement faire passer ça pour une feinte, quelque chose d'insignifiant, d'ailleurs c'était peut-être la meilleure chose à faire « C'était rien. » Ces mots transpiraient le mensonge mais il ne pouvait faire autrement, il ne voulait pas faire autrement, assumer ce qu'il était et ce qu'il venait de faire lui paraissait impossible, lui qui n'avait toujours fréquenté que des filles auparavant, et quelques garçons bien sûr mais ce n'était jamais aller bien loin. Matt releva la tête vers Casper, son regard avait changé et une certaine conviction avait remplacé le doute qu'il y avait auparavant « Ne t'imagines pas qu'il y a quelque chose à tirer de ce qui vient de se passer, tu n'as rien a faire dans ma vie et je n'ai rien a faire dans le tienne. » Et pourtant Matt aimerait le contraire, faire partie de sa vie et que leur petite guerre cesse mais ça ferait trop de changement en trop eu de temps. Il avait besoin de temps pour comprendre ce qui venait de se passer mais plus il observait le visage de son partenaire, plus il avait envie de replonger sur ses lèvres mais il devait luter contre cette irrésistible envie.

« Tu as une définition du mot rien différente de la mienne. » J’ai envie de le frapper ou de l’embrasser encore une fois, peut-être les deux. Ma voix est neutre, mais basse et solide, comme à mon habitude. Il n’y a pas une seule note d’hésitation dans mes paroles et, sincèrement, je me demande comment j’ai pu arriver à un tel résultat. Parce qu’à l’intérieur je deviens fou. Je ne sais plus quoi penser, je ne sais plus si ce qui vient de se passer signifie quelque chose. Il y a de la résolution dans les mots de mon partenaire et j’ai un poids lourd et désagréable, déséquilibrant, qui me prend au ventre. Je fais peut-être un pas de côté, je ne sais pas. Je sens mes jambes vaciller sous moi mais je n’ai pas vraiment conscience des mouvements de mon corps. D’une façon ou d’une autre, j’arrive à me tenir debout. Je ne l’avouerai jamais mais, en ce moment, j’ai peur. Je suis terrifié à l’idée qu’il se soit foutu de moi. L’idée qu’il ne m’a embrassé que parce qu’il sait que j’ai sentiments pour lui et qu’il voulait, en quelque sorte, se foutre de ma gueule fait plus qu’effleurer mon esprit. L’assurance qu’il met dans ses mots me déstabilise et, malgré moi, me fait mal. Je ne peux pas soutenir son regard plus longtemps et je détourne la tête, fixant mes yeux sur un point dans le vide. « Écoute… » Ma voix se brise presque inévitablement et je me tais plusieurs secondes, laissant le temps à ma respiration de redevenir normale, tentant d’oublier la douceur de ses lèvres contre les miennes et de convaincre mon corps que non, se rapprocher de la réconfortante source de chaleur un peu plus loin devant lui n’est pas une bonne idée. Lorsque je reprends la parole, je ne le regarde toujours pas, mais j’ai à peu près récupéré mes moyens. Ma voix n’a pas son assurance habituelle, elle tremble et ça a quelque chose d’inquiétant. « Oublie. Tu as raison. Il ne s’est rien passé. » Alors, je réalise que le tremblement dans ma voix n’a rien à voir avec la honte ou le mal, n’a rien à voir avec le fait que j’ai l’impression qu’on vient de me frapper en plein cœur avant de l’ouvrir en deux. C’est la colère qui a retrouvé son chemin dans mon système. Elle n’était jamais partie bien loin, et la phrase qui suit pue le ressentiment. « J’espère que tu as conscience que t’es un enfoiré de la pire espèce. »

Après ce qu'il venait de dire il se s'attendait pas un un éclatement de joie de la part de Casper, l'agent du FBI demeurait silencieux face à son partenaire mais captait chaque inflexions de sa voix. Si il ne retenait pas aussi bien ses sentiments, ses yeux se seraient déjà humidifiés, il se détestait pour ce qu'il avait dit, ce n'était pas le premier mensonge qu'il disait mais celui-ci lui avait fait mal, chaque mot lui avait brûlé la gorge mais ils étaient tous sortis. Il entend sa voix se brisée sur un simple mot et ça lui fend le cœur, il prend conscience de ce qu'il a fait et de ce qu'il ne pourra plus jamais faire ; il ne pourra plus jamais le regarder dans les yeux sans s'en vouloir et sans se sentir coupable de l'avoir fait souffrir car même si Casper tentait de le dissimuler il voyait très bien qu'il avait prit un coup et c'était de sa faute. Le problème c'est qu'il ne pouvait pas oublié parce qu'il avait aimé ce moment, le moment où leurs lèvres s'étaient unis et où leurs deux corps s'étaient retrouvés collés l'un contre l'autre. Le lui dirait-il un jour ? Il l'ignorait, il devait encore se faire à l'idée. Il savait qu'il s'était comporté comme un enfoiré et il le regrettait mais jamais Casper ne le croirait si il lui disait qu'il était terrifié à l'idée de l'aimer ou du moins qu'il lui plaise, qu'il était bel et bien homosexuel et qu'il ne le laissait pas indifférent. Il l'imaginait bien se dire que tout cela n'était qu'une machination pour lui faire du mal, si ça avait été le but ça avait clairement atteint l'objectif visé mais ce n'était pas ce qu'il voulait. Il se contre-disait sans cesse et n'arrivait pas à se mettre d'accord avec lui-même « Je sais, mais l'enfoiré tu l'as laissé t'embrasser et t'en a même redemandé. » Matt cherche le regarde de son partenaire mais il n'arrive pas à le trouver, il a réussit à le blesser et à se blesser en même temps, il se déteste, se maudit. L'agent soupira doucement en posant son regard sur son bureau qui était étrangement net et rangé « Je suis désolé. » Les excuses n'étaient pas ce qui sortait le plus facilement de la bouche de Lawrence mais quand c'était le cas, elles étaient sincères et bien pesées.

« Pas autant que moi. Crois-moi. » Je fais un pas en arrière, puis deux, avant de complètement me retourner. Pour qui est-ce qu’il se prend ? Il n’a pas le droit de s’excuser. Il n’a pas le droit de me manipuler comme ça, de jouer avec mes sentiments, de m’embrasser comme ça pour me faire sentir comme une drama queen de quatorze ans la seconde d’après. C’est juste lâche et c’est bas et c’est cruel et ça fait mal. Maintenant qu’il ne peut plus me voir, je ferme les yeux et je remercie le monde de ne pas m’avoir donné la larme facile. Je traverse la pièce en silence, contourne mon bureau et m’assois derrière celui-ci. Je baisse les yeux sur la pile de documents qui s’y trouvent. On a un tueur – deux, je suis certain qu’ils sont deux – à coincer et je sais que le travail est probablement la seule chose qui puisse me faire oublier le vide immense que je ressens. Sauf qu’attendre qu’on coince les deux cinglés, ce n’est pas assez, pas dans mon état actuel. Mon profil est correct, j’ai tout expliqué à Erik, ils savent ou chercher. Je ne me sens plus utile. J’ai besoin de me sentir utile. J’ai toujours pu oublier mes problèmes en me concentrant sur un problème difficile à saisir : j’ai besoin d’une énigme. Sans accorder une once d’attention à Lawrence, je sors mon téléphone de ma poche, presse quelques touches et appuie l’objet contre mon oreille. La voix d’Erik me ramène à une réalité que je sais gérer : le travail. « J’ai besoin d’une affaire. Tout de suite. » Pause de quelques secondes pendant lesquelles mon patron soupire et réplique que celle en cours n’est pas encore vraiment terminée et blablabla. « Tout de suite, Erik. Allez, tu as toujours quelque chose pour moi. Où j’en suis, je prendrais même quelque chose d’un peu simple. » Nouvelle pause, pendant laquelle l’effort que je dois faire pour ne pas lever les yeux vers mon co-équipier paraît encore plus impossible. « Non. Tu sais ce qui s’est passé la dernière fois que j’ai travaillé sur une affaire de viols. De toute façon, la solution est facile, donne le dossier à Smith. La femme, pas l’homme… Non plus… D’accord. C’est bon. Oui, oui. » Je raccroche presque avec regret. Sans lever les yeux vers Lawrence, je lui adresse la parole. « Le patron n’a rien de sérieux. Tu peux rentrer. Je vais repasser sur les vieilles affaires non-résolues. » Je fais une pause avant d’ajouter, un peu à contrecœur : « Écoute, je sais que les choses n’ont jamais été très… cordiales, entre nous. Mais tu es un bon agent. Sincèrement. J’aurais jamais cru que qui que ce soit puisse me supporter aussi longtemps et je crois que la raison pour laquelle Erik refuse de te remplacer, c’est que tu es probablement le seul agent dans tout le service qui ose se foutre ouvertement de ma gueule. Il croit que tu me rends presque fonctionnel. Je le prendrais comme un compliment. »

Visiblement ses excuses ne servaient à rien car Casper avait déjà reculé et Matt n'avait pas su le rattraper, dire quelque chose pour capter son attention et l'empêcher de s'éloigner de lui. Mais il n'avait rien trouvé, pour vanner les gens et les rabaisser dans le quart de seconde qui suit c'est un champion mais quand il s'agit de sentiments il n'est pas plus futé qu'un gamin de douze ans et il le sait. Alors il garde le silence et c'est ce silence qui lui donne l'impression de perdre son partenaire, si il se trouvait dans l'incapacité de rattraper la situation leur duo courait aux désastre déjà que c'était pas bien fameux. L'agent suivit son partenaire du regard et si Casper c'était retourné à ce moment là il aurait pu lire dans les yeux de Lawrence combien il était désolé, combien il se sentait con et combien il aimerait se faire pardonner mais il ne le fit pas. Pour finir Matt s'assit sur son fauteuil à son tour, attrapa un dossier et se cala dans sa chaise, les pieds sur le bureau, faisant mine d'être décontracté alors qu'il était plus tendu qu'un ressort étiré par deux tracteurs. Il ne pouvait s'empêcher de jeter de brefs coups d’œils vers Casper mais rien n'y fit, celui-ci ne lui prêtait plus aucune attention. Son regard finit par se poser sur le dossier qu'il tenait dans les mains, ses yeux parcourant les lignes sans en saisir le moindre mot. Une fois dans son cerveau il s'évaporaient. Il l'écouta demander une affaire à Erik mais ne fit aucun commentaire alors qu'en temps normal il ne s'en serait pas privé le moins du monde mais il n'avait pas la tête à ça. Son attention fut attirée une nouvelle fois vers Casper lorsque celui-ci lui adressa la parole « Les stagiaires ont été conçus pour ranger les archives. » Matt planta dans ses yeux ce regard désinvolte et mordant, froid, il ne l'arborait que rarement mais la situation était tout a fait approprié à son goût puis il embraya sur ce que Casper venait de dire « Tu as l'air de croire beaucoup de choses mais est-ce-que t'es seulement convaincu d'un seul truc ? T'as pas imaginer que je puisse pas assumer d'être homo ? Non parce que t'es tellement centré sur ta petite personne que t'y as pas songé une seule seconde. Et puis t'as peut-être pas saisit qu'on est censé bosser ensemble et pas se lécher la gueule et puis même si ça se faisait, qu'est-ce-qui te dit qu'une quelconque relations marcherait hein ? T'as vu comment on se fous sur la gueule ? On dirait deux collégiens c'est pathétique. Et puis même si t'as des sentiments ou d'autres conneries dans le genre qu'est-ce-qui me dit que c'est sérieux, que c'est pas du vent ? Quand on me parle d'amour j'ai l'impression d'entendre des menaces. » Voilà il avoit tout sortit, c'était surement pas très cohérent mais dans l'ensemble l'idée était là. Matt reprit son souffle et détacha son regard de son partenaire pour le reposer sur le dossier qu'il avait dans les mains, à cet instant il avait une furieuse envie de le cramer, de le bouffer, de se passer les nerfs dessus mais il n'en fit rien et garda sa colère en lui mais il était pas furieux contre Casper, il était furieux contre lui-même, d'être ce qu'il est.